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Traité sur le plastique : aucun accord trouvé, mais de plus en plus d’États ambitieux

Les pays des Nations unies ont échoué à s’entendre sur un traité mondial sur le plastique à l’issue de la cinquième session de négociations. Les discussions vont être prolongées, avec des États pétroliers de plus en plus isolés.

Ce devait être la cinquième et ultime session de négociations (INC-5) pour aboutir à un traité international contraignant sur le plastique. Mais les Nations unies ont échoué à obtenir un accord à Busan, en Corée du Sud. Après une semaine de débats, les États se sont quittés le 2 décembre, à 2 h 50 du matin (heure locale) sans texte commun.

Tout espoir de traité n’est cependant pas perdu : décision a été prise de reprendre les discussions dans le cadre d’un INC-5.2 en 2025, à une date qui reste à définir. « Ne pas obtenir de texte final est une déception, reconnaît Henri Bourgeois-Costa, directeur des affaires publiques de la Fondation Tara Océan, qui était sur place. Une déception mais non une surprise et encore moins un abattement. Il ne s’agit que d’un retard. Ce traité aborde un sujet majeur, d’une complexité importante et qui touche à nos quotidiens, mais aussi à des intérêts structurant les économies mondiales, ceux de la pétrochimie. Tout cela prend du temps. Mais cela progresse. »

Des pays pétroliers de plus en plus isolés

La version brouillon du texte s’est enrichie mais contient encore énormément d’options. En revanche, l’équilibre des forces s’est nettement modifié au cours de la semaine. Les pays favorables à un traité ambitieux sont de plus en plus nombreux. 95 font désormais partie de la coalition de Haute ambition pour mettre fin à la pollution plastique, alors qu’ils étaient 67 au départ. Par ailleurs, environ 130 États se sont déclarés favorables à la réduction de la production de plastique, principal point d’achoppement.

En face, les récalcitrants à un traité ambitieux — appelés les « like-minded », car partageant le même point de vue — se comptent désormais sur les doigts des deux mains : ils sont neuf, menés par la Russie, l’Arabie saoudite et l’Iran.

Pour eux, le futur traité doit uniquement concerner la gestion des déchets et le recyclage, et non la production. Ils n’ont eu de cesse, au cours de ces sept jours, de jouer la montre en répétant sans fin les mêmes arguments, comme ils en ont pris l’habitude depuis deux ans et le début des pourparlers. Selon Henri Bourgeois-Costa, « les deux camps sont irréconciliables tant leur vision diffère. L’Arabie saoudite a même affirmé que la science se négocie ! »

Mais cette stratégie de pourrissement pourrait avoir durablement desservi les défenseurs de la pétrochimie. « Elle a fini par peser sur les négociateurs et provoquer leur agacement. Ce qui a pu pousser des États indécis à prendre position », juge le responsable de la Fondation Tara Océan. Selon lui, les pays « like-minded » se retrouvent aujourd’hui isolés.

« Les applaudissements nourris ont montré à quel point un traité plus ambitieux est soutenu »

Plusieurs membres du bloc dit ambitieux ont pour la première fois pris la parole pour dénoncer cette obstruction et mobiliser les pays indécis. Ce fut notamment le cas de Juliet Kabera, la négociatrice en chef pour le Rwanda, dont l’appel à « défendre un texte ambitieux » a entraîné une standing ovation de centaines de délégués et d’observateurs présents dans la salle. « Les applaudissements nourris qui ont suivi ont montré à quel point un traité plus ambitieux est soutenu », rapporte le collectif Break Free from plastic.

Parmi les pays encore indécis figure la Chine, dont la position, difficile à cerner pour l’heure, sera cruciale. Plusieurs ONG remettent toutefois en cause le processus de négociation : la plupart des discussions ayant été tenues à huis clos, des observateurs issus de la société civile n’ont pas pu y participer.

« Nous avons été exclus des négociations, un processus dominé par les États producteurs de pétrole et leurs alliés, estime Jules Vagner, cofondateur d’Objectif Zéro Plastique. Le modèle de consensus continue de profiter aux États pétroliers peu ambitieux, ce qui freine les progrès et compromet l’efficacité du traité. »

On atteint la limite du processus onusien basé sur la recherche du consensus, estime Henri Bourgeois-Costa : « Désormais, on a besoin d’une négociation au plus haut niveau. Ce sont les chefs d’État qui doivent s’impliquer. »

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