Sur terre comme sur mer, pratiquement plus aucune zone du globe n’échappe à la prolifération des résidus de déchets plastiques. Cette pollution, qui affecte les écosystèmes, devrait se poursuivre ces 30 prochaines années. La perte de capital naturel causée par cette pollution sur la seule pêche et sur le tourisme se chiffre déjà à 8 milliards de dollars par an.
Des déchets plastiques à n’en plus finir et à ne plus savoir qu’en faire. En croissance de plus de 3 % par an depuis 2010, leur masse, à l’échelle mondiale, a atteint le niveau faramineux de 310 millions de tonnes en 2016. Un chiffre tout à fait provisoire car la production de plastique n’a sans doute pas fini d’augmenter. Estimée à 396 millions de tonnes il y a trois ans, dans un très récent rapport du WWF , elle pourrait dépasser les 550 millions de tonnes dans 30 ans.
Problème : un bon tiers de ces déchets plastiques, soit une centaine de millions de tonnes, échappe à tout traitement (mise en décharge, incinération, recyclage) et part se perdre dans la nature. Les neuf dixièmes de ces « fuites » vont se répandre et s’accumuler dans les écosystèmes terrestres, le reste finit dans les océans et leurs milieux naturels à raison de plus de 9 millions de tonnes par an. Un rythme que l’ONG ne s’attend pas davantage à voir baisser lors des trois décennies à venir.
La Méditerranée en détresse
Au final, « la pollution plastique des océans pourrait atteindre 300 millions de tonnes d’ici à 2030, sur la base des prévisions actuelles de croissance de la population, du PIB par habitant et de la production actuelle de déchets plastiques par habitant », jugent ses experts. A cette même échéance et si rien n’est entrepris pour l’empêcher, les mers du globe porteront le même poids de déchets que de poissons, selon la Fondation Ellen MacArthur.
SCIENCES – A la recherche des microplastiques en mer
Aucune étendue maritime n’est épargnée par ce phénomène, dont l’intensité varie toutefois. La zone orientale de l’Asie et des pays du Pacifique est plus polluée (57 millions de tonnes) que l’Europe et l’Asie centrale (45 millions) et l’Amérique du Nord (35 millions), selon une récente étude de la Banque mondiale . A elle seule, la mer Méditerranée « récupère » chaque année quelque 600.000 tonnes de plastiques sur les 24 millions de tonnes de déchets produits par ses 22 pays riverains, signale le WWF dans un rapport dévoilé vendredi à l’occasion de la journée des océans.
Mauvais pour le climat
Ce régime se révèle des plus indigestes pour le vivant, à la surface comme au fond des océans. Le WWF a recensé, à ce jour, plus de 270 espèces victimes d’enchevêtrement et plus de 240 d’absorption de plastique. Le bilan économique est également très lourd. Le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) chiffre à 8 milliards de dollars par an la perte de capital naturel causée par cette pollution sur la pêche et sur le tourisme.
Les déchets plastiques qui ne sont pas dispersés dans les mers ou sur terre font aussi du tort à la planète. Les émissions de dioxyde de carbone résultant de leur incinération (15 % des déchets produits) ou de leur déversement à ciel ouvert (14 %) pourraient tripler d’ici à 2030 et atteindre annuellement 350 millions de tonnes, selon l’ONG. Un mauvais coup porté à la lutte contre le réchauffement climatique et la montée des océans, elle-même provoquée par ce dérèglement.
Joël Cossardeaux